Anse de Topiti: débarquement de la mission Pearl Harbor -
Deux missions partent d'Alger pour la Corse en décembre 1942 et janvier 1943. Elles agissent sans concertation. L'une d'elles, Pearl Harbour, est l'émissaire des services du général Giraud installés à Alger. L'autre, Sea Urchin, a été préparée à Londres sous le contrôle du général de Gaulle. Date : Dimanche, 13 Décembre, 1942 Lire la suite ...Anse de Topiti: débarquement de la mission Pearl Harbor -![]() Deux missions partent d'Alger pour la Corse en décembre 1942 et janvier 1943. Elles agissent sans concertation. L'une d'elles, Pearl Harbour, est l'émissaire des services du général Giraud installés à Alger. L'autre, Sea Urchin, a été préparée à Londres sous le contrôle du général de Gaulle. Pour la première fois depuis que l’Afrique du nord est libérée, dans la nuit du 13 au 14 décembre 1942, un sous-marin, le Casabianca débarque, dans l’anse de Topiti entre Porto et Cargèse, la mission Pearl Harbor composée de 4 personnes : De Saulle, Laurent Preziosi, Toussaint Griffi et le radio Pierre Griffi muni de son poste. La mission traverse la route et rejoint Revida avant d’aller à Marignana, puis Corte. |
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Bio : Roger de Saule de Saule Roger
![]() Roger de Saule est né en 1889 à Bruges (Belgique). Ancien magistrat, expert éprouvé de l’espionnage et des services spéciaux, on fait appel à lui pour diriger le commando de la mission secrète Pearl Harbor en relation avec Alger. De son vrai nom Robert de Schrevel, ancien combattant de 1914-1918, engagé dans la Légion étrangère en 1939, il travaille à partir de la fin 1939 aux Pays-Bas comme attaché de la force aérienne au sein de la légation française puis il reçoit la direction de l’antenne du SR Air (Service de Renseignement militaire de l’armée de l’Air française) à Poligny (Jura) notamment pour obtenir des informations auprès d’un réseau de Belgo-Hollandais sur les champs d’aviation allemands en Belgique et aux Pays-Bays. En 1941, le SR Air est en liaison radio avec le service secret britannique M16. En novembre 1942, le personnel du SR Air est obligé d’évacuer vers l’Afrique du Nord et de Saule se retrouve donc à Alger. |
Bio : Laurent Preziosi Preziosi Laurent
![]() (1912-2010) |
Bio : Griffi Toussaint Griffi Toussaint
![]() Né(e) à Ghisonaccia (France, Haute-Corse(2B)), le 15 avril 1910 - 2005 Originaire de Poggio di Nazza, il est né à Ghisonaccia. Engagé en 1930 à l’âge de 20 ans, au 9ème régiment des zouaves, il était devenu un militaire expérimenté à l’entré en guerre de la France en juin 1940. Il s’était battu sur le front contre les allemands au canal de l’Ailette. Il fut un des seuls rescapés à éviter l’encerclement et effectuer le repli sur l’Aisne et le Centre. Son régiment fut tranféré en Algérie. Il devient le secrétaire du Colonel Jousse, un des principaux artisans militaires de l’opération d’aide au débarquement des Alliés en AFN, l’opération Torch du 8 novembre 42. Par son intermédiaire, il se porte volontaire pour effectuer une mission secrète de coordination des réseaux de résistance en vue d’un débarquement en Corse, la mission «Pearl Harbour». A El biar, dans le bureau du Colonel Ronin, chef des services spéciaux, il retrouve son cousin germain Pierre Griffi, radio dans le civil, résistant et ancien des Brigades Internationales, fait la connaissance de Laurent Préziosi, résistant, enseignant et militant socialiste, de celui qui deviendra leur chef de mission, Roger de Saule, professionnel de l’espionnage, et du commandant du sous-marin Casabianca, Jean L’Herminier. Ils arrivent clandestinemment avec le sous-marin Casabianca dans la nuit du 14 décembre à 1 h du matin dans la baie de Topiti au nord de Cargèse. De là commencera leur périple à travers toute l’île pour rencontrer les personnes responsables de réseaux locaux susceptibles de donner leur accord pour l’organisation d’un débarquement militaire français sans avoir pour cela à se soumettre à une autorité politique. Ils rencontrent les premiers responsables par pieve à Piana, Corte, Bastia, Ajaccio, Calvi, St Florent, Sartène. Ils participent le 6 février 1943 à la 1ère importante livraison d’armes par le sous-marin Casabianca, sur la plage de Chjuni, au sud de Piana. Repérés, Toussaint Griffi et Lazurent Préziosi doivent repartir le 10 mars de Sari-Solenzara par le sous-marin mais leur mission était accomplie. Ils rencontrent à Alger le nouveau chef de mission, Paulin Colonna d’Istria, chargé de l’organisation militaire des réseaux pour lui fournir tous les renseignements utiles. Désigné comme officier de sécurité militaire, il débarque en Corse en septembre 1943, avec les premiers éléments du Bataillon de Choc et prend part aux opérations de libération de la Corse. Il arrête lui-même le Procureur du Roi, le capitaine italien Lopane, qui avait fait exécuter son cousin germain Pierre Griffi le 18 août à Bastia. L'officier italien s’était réfugié dans un village en Corse. En mai 44, Griffi quitte ses fonctions en Corse et est rappelé en Afrique du Nord. Il débarque en France métropolitaine en septembre 44 pour prendre la direction des services spéciaux jusqu’à la libération du territoire national. Il retourne à nouveau en Afrique du Nord puis poursuivra sa carrière militaire en Extrême Orient de 1950 à 1952. Réaffecté en Afrique du Nord il quitte définitivement l’armée en 1962. Dès lors il reprend une activité professionnelle dans le civil jusqu’à sa retraite. Il s’est éteint en 2005. |
Bio : Pierre Griffi Pierre Griffi Pierre Pierre
![]() Né à Alger, le 13-05-1914. Décédé le 18-08-1943 à Bastia. D'origine corse, Pierre Griffi, fils de Don Jean et Pauline Didier, est né à Alger. Homme de gauche, il combat le fascisme dans les rangs de Brigades Internationales, en Espagne. Radio militaire. Il vient en Corse avec la mission Pearl Harbour et y demeure après le retour à Alger des autres membres de la mission de décembre 1942. Pris par l'OVRA, il est condamné à mort par le tribunal militaire italien et exécuté le 18 aôut 1943. |
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![]() Extraits du livre de Maurice Choury La Résistance en Corse -Tous bandits d’honneur - Éditions sociales (1968) - La Marge Edition (1988); Éditions Piazzola septembre (2011)Mission Pearl Harbor. Etablir le contact avec la RésistancePremier objectif: atteindre le hameau de Revinda et trouver un refuge pour installer le poste. Denis reste à la plage. Les autres s’enfoncent dans le maquis, s’orientant à l’estime, et franchissent avant le petit jour la route nationale près du pont de Fornello où une vieille bergère 1 leur indique le chemin de Revinda. De Saulle boite bas. Preziosi et Toussaint Griffi prennent les devants. On grimpe à flanc de colline, dans une contrée dont l'aurore dévoile la sauvage beauté. Maquis chétif, herbe rare, horizon barré pat de gigantesques chaos rocheux. Il semble que toute vie se soit retirée de ce coin de terre. Non, voici les empreintes fraîches d'une harde de sangliers et voici même «un cristianu» 2. Sur le sentier qui mène à Revinda, un curé chemine à dos de mulet. Preziosi et Griffi se tapissent, l'observent au passage et chuchotent: Si on l'abordait? Hum! c'est peut-être un vichyste... Tu sais, les curés et Pétain, ça marche ensemble. Pas celui-là. Regarde-le. C'est un paysan en soutane. Il l'a même retroussée, le gaillard! Je le verrais mieux en braconnier qu'en curé. C'est la Providence qui nous l'envoie! Bah! on ne connaît personne dans le secteur. Alors, celui-là ou un autre... Le curé de Cargèse sursaute en voyant surgir du maquis deux têtes totalement inconnues. Abordé sans trop de précautions, il est quelque peu sceptique: Qui me prouve que vous dites vrai? Votre histoire de sous-marin me paraît fantastique. La région est infestée d'Italiens... Et ça, vous en connaissez par ici? réplique Preziosi en exhibant sa mitraillette. L’abbé Mattei est convaincu. Il prend nos deux hommes sous sa protection. Pour un peu, il leur donnerait sur-le-champ sa bénédiction. Le commandant rejoint le groupe. On monte à Revinda où l'on fête sainte Lucie. Le curé fournit un guide, Dominique Antonini, et des mulets. On récupère le radio Griffi demeuré avec sa lourde valise près du point de débarquement et on progresse, à travers monts, vers Marignana. Où les frères Nesa 3 et leur oncle Antoine alertent le curé du village. L'abbé Ceccaldi part aussitôt à la recherche d'une «planque». Pour le poste émetteur et son radio. Par Cristinacce 4 et Calacuccia, on gagne Corte où les émissions commencent dès le 19 décembre au domicile d’un Alsacien nommé Lhoersch. [...] 14 décembre 1942, pour la première fois un sous-marin venu d’Alger se positionne à quelques centaines de mètres des côtes corses et y débarque, avec un youyou, les premiers hommes de la mission Pearl Harbor. Le sous-marin a quitté Alger le 11 décembre 1942 au soir pour y débarquer sur les côtes corses quatre hommes de la mission Pearl Harbor. Le choix du lieu se porte sur la côte ouest très découpée, précisément entre Cargèse et Piana sur la petite plage de Topiti, située au fond de la baie de Chjuni. La Résistance corse étant dépourvue de poste radio émetteur-récepteur, le sous-marin n’est ni annoncé ni attendu. Donc, la mission devra être débarquée « blind », à l’aveugle, et s’aventurer dans le maquis en espérant qu’elle ne rencontrera pas les soldats de l’armée italienne et au contraire pourra établir le contact avec la Résistance insulaire. La mission est périlleuse. Bona furtuna ! Après la frayeur causée par un début d’incendie dans le compartiment des munitions, au terme de deux jours de navigations, les côtes corses sont en vue. Mais frayeur encore ! Cette fois c’est à cause du périscope déréglé qui n’a pas averti que le sous-marin s’approchait dangereusement d’une paroi rocheuse. A 0 heure trente, ce 14 décembre 1942, le sous-marin, qui a fait surface, largue un youyou avec les hommes de la mission (Le commandant de Saule, Laurent Préziosi et les cousins Denis et Pierre Griffi), M. Brown des services secrets américains et deux marins (Le quartier-maître Lionnais et le timonier Vigot) qui mènent le youyou jusqu’à terre. Ils emportent avec eux un poste valise radio clandestin. Lionnais et Vigo reviennent à bord. De Saule, Preziosi et Toussaint Griffi après une longue marche dans le maquis établissent le contact avec des patriotes à Revinda, petit hameau de Marignana. Le soir du 14, ils reviennent chercher Pierre Griffi resté sur la plage avec son poste radio, en compagnie de Brown. Le sous-marin envoie un youyou avec trois hommes (Lionnais, Vigo et Lasserre) pour récupérer l’Américain mais la mer est forte et le frêle esquif est drossé contre les rochers, donc inutilisable. Brown, excellent nageur, réussit à rejoindre le sous-marin et annonce la bonne nouvelle : le contact est établi. Mais la mauvaise nouvelle c’est que les trois hommes d’équipage devront rester à terre en attendant qu’on puisse un jour les récupérer.
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![]() Premières missions sans concertation en Corse occupée : Pearl Harbour et Sea Urchin.Deux missions partent d'Alger pour la Corse en décembre 1942 et janvier 1943. Elles agissent sans concertation. L'une d'elles, Pearl Harbour, est l'émissaire des services du général Giraud installés à Alger. L'autre, Sea Urchin, a été préparée à Londres sous le contrôle du général de Gaulle. Le commandant de Saule, un officier de renseignement d'origine belge, dirige Pearl Harbour. Cette mission réussit à conclure des accords avec le Front national corse qui est de direction communiste. Fred Scamaroni, chef de la mission Sea Urchin, n'en a pas la possibilité, dans la mesure où les communistes n'acceptent pas de faire allégeance à De Gaulle. Les deux missions ont un objectif commun qui est la libération de la Corse, et elles oeuvrent dans le même temps jusqu'à l'arrestation de Fred Scamaroni en mars 1943, mais sans coopérer. Quant aux rapports entretenus avec les dirigeants communistes en Corse par la mission Pearl Harbour, et à leurs effets politiques, Toussaint Griffi en minimise le poids. Il écrit en juillet 1998 au président de l'ORA : Au lendemain de la Libération, les communistes en perte de vitesse idéologiquement parlant, avec l'apport de quelques partisans n'appartenant à aucune organisation structurée, se sont réunis pour s'attribuer le travail accompli par la mission De Saule. L'analyse de Laurent Preziosi est un peu différente : dans une lettre au général Roidot du 26 juillet 1998, il évoque le rôle du Parti communiste à la libération de la Corse : .. que les dirigeants communistes tel Arthur Giovoni aient pu dans une certaine mesure s'assurer au nom du Front national une influence majeure, à qui la faute ? Et pourquoi le leur reprocher ?. Quant à l'engagement dans une mission giraudiste, il estime que les faits l'ont justifié. Auteur : Hélène Chaubin
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