Capu di Fenu: dernière mission clandestine du sous-marin Casabianca -
Dans la nuit du 5 au 6 septembre le sous-marin Casabianca effectue sa dernière mission clandestine. Mission : - Récupérer Arthur Giovoni, un des responsables de la Résistance, pour le mener à Alger. - Mettre à terre deux membres des Renseignements : le lieutenant Giannesini et un radio. - Débarquer 5 tonnes d’armes anti-tanks en vue de l’affrontement prochain avec l’armée allemande. Date : Dimanche, 5 Septembre, 1943 Lire la suite ...Capu di Fenu: dernière mission clandestine du sous-marin Casabianca -![]() Dans la nuit du 5 au 6 septembre le sous-marin Casabianca effectue sa dernière mission clandestine. Mission : - Récupérer Arthur Giovoni, un des responsables de la Résistance, pour le mener à Alger. - Mettre à terre deux membres des Renseignements : le lieutenant Giannesini et un radio. - Débarquer 5 tonnes d’armes anti-tanks en vue de l’affrontement prochain avec l’armée allemande. La mission est accomplie dans la baie de Capu du Fenu, au nord d’Ajaccio ; sans incident malgré la forte présence de troupes italiennes qui surveillent les côtes. Commencée vers minuit, l’opération est achevée vers 4 heures du matin. |
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Bio : Arthur Giovoni Giovoni Arthur
![]() Arthur Giovoni est l'un des responsables politiques du Parti communiste en Corse, depuis les années trente : sa vie de militant commence en 1934, année de son adhésion. Pendant l'occupation italienne, il est rapidement reconnu comme le principal dirigeant du Front national même si l'initiative de la création du Mouvement revient dès 1941 à des responsables communistes comme Léo Micheli. Après la libération de l'île, Arthur Giovoni est considéré comme un représentant incontournable de la Résistance insulaire par le Comité de la libération nationale d'Alger. Il est issu d'une famille originaire d'Azilone-Ampaza, dans le canton de Sainte-Marie-Sicche. Ses parents sont instituteurs à Moca-Croce, où il nait le 6 octobre 1909. Il fait ses études secondaires au lycée Fesch à Ajaccio jusqu'au baccalauréat, avant d'aller à Aix-en-Provence où il obtient une licence de philosophie en 1933. Il est nommé professeur à Bastia, puis à Ajaccio où il se signale par sa participation à une grève très peu suivie en 1938. Il participe à la création de l'Union départementale des syndicats, le 21 mai 1939. Il s'est fait connaitre dans les années précédentes comme un propagandiste actif par son soutien au Front populaire. Il était membre du bureau fédéral avant que ne soit créée, en 1937, la région corse du Parti communiste. Le parti est faible : mais il présente des candidats. A Bastia, aux cantonales de 1937, Arthur Giovoni obtient 225 voix sur les 408 recueillies au total par les communistes ( 24 012 suffrages exprimés). Il a 30 ans quand la guerre éclate, il est mobilisé au 92° régiment d'artillerie. Il est démobilisé en juillet 1940. Il retrouve un poste à Bastia mais, sur la réclamation de la Légion française des combattants, il est muté au lycée de Rodez où il a une activité clandestine de soutien aux enseignants révoqués par Vichy ; il contribue à l'organisation d'une commémoration interdite : celle du 14 juillet 1942. C'est pendant l'été de 1942 qu'il réussit à constituer à Azilone un groupe du Front national corse. Il ne retourne à Rodez que pour peu de temps, puisqu'il regagne la Corse dès la fin d'octobre 1942, afin d'échapper à une arrestation. Les Italiens débarquent quelques jours plus tard et Arthur Giovoni ne quitte plus la clandestinité. En décembre, avec l'arrivée de la mission Pearl Harbour, des moyens de liaison et de combat vont enfin être donnés au Front national qui peut recruter et se structurer. C'est en avril 1943, à la conférence de Porri, qu'Arthur Giovoni accède à une haute responsabilité au sein du Comité départemental de son mouvement, en étant particulièrement chargé des problèmes politiques. Sur le terrain, il est très actif. En raison de l'évolution de la situation politique et militaire en Italie, il opte, de concert avec Maurice Choury, pour la préparation d'une insurrection armée, en liaison avec des éléments non fascistes des troupes italiennes. La Résistance dispose de moyens en armes légères fournis par les parachutages ou livrés par les sous-marins essentiellement grâce aux accords passés avec Colonnna d'Istria. Dans ses Mémoires, le général de Gaulle rappelle ces accords dont il n'a pas été informé et il ajoute : ...Le Parti communiste avait envoyé, de France, en mission auprès de Giraud, le député des Alpes-Maritimes Pourtalet qui, de Nice, s'était longtemps tenu en liaison avec Giovoni. Le consentement d'Ager à une insurrection n'ayant pu être obtenu, Arthur Giovoni est embarqué le 5 septembre sur le Casabianca dans le golfe de Lava, porteur d'un état des positions italiennes en Corse. Arrivé à Alger le 8 septembre, il rencontre le général Giraud quelques heures avant l'appel au soulèvement dans l'île. Il y revient, dans la nuit du 13 au 14, avec le nouveau préfet Luizet et des renforts transportés par Le Fantasque et Le Terrible. Il rejoint le conseil de préfecture, placé par le Front national auprès du préfet Pelletier, que Luizet vient remplacer. Une ordonnance du CFLN, datée du 17 septembre 1943, désigne les deux représentants des organismes de la Résistance corse à l'Assemblée consultative d'Alger : Arthur Giovoni et Henri Maillot. Paul Giacobbi est nommé en tant que parlementaire. Auteur:
Hélène Chaubin
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![]() Extraits du livre de Maurice Choury La Résistance en Corse -Tous bandits d’honneur - Éditions sociales (1968) - La Marge Edition (1988); Éditions Piazzola septembre (2011) - Pages 105 et 106.Giovoni embarque à Capu di FenuLe 4 septembre, je remonte dans la région de Vico, pour y orgniser un parachutage. Le recrutement est en plein essor mais le canton est encore totalement dépourvu d'armes. Je me dispose à passer la nuit à Parapaggio, nid d'aigle juché au-dessus d'Arbori, quand arrive Martin Borgomano, en proie à l'agitation la plus vive : - Annibal! Annibal! Il faut redescendre tout de suite à Ajaccio... «J’aime Paimpol et sa falaise, son biniou et son grand pardon».., Pas de doute, le débarquement est imminent1! Nous dévalons sur Ajaccio où les événements se sont précipités. Le sous-marin est annoncé. Notre rendez-vous fixé dans le golfe de Lava est accepté. «Lorraine» (Maillot) est déjà parti pour Villanova avec l'équipe de réception. On attend «Luc» (Arthur Giovoni) en instance de départ pour Alger. Toute la soirée du 5, je guette son arrivée au carrefour du Haras, comme convenu, pour le piloter... Qu'est-il devenu? Je suis mortellement inquiet. J'apprends le lendemain qu'il est arrivé à bon port. En avance de quelques heures sur l'horaire, il a poussé sur Villanova, après avoir conduit un radio à Pisciatello. Au P. C. de la Grotte, on a reçu, un beau jour, un message annonçant pour la nuit même un parachutage combiné: armes et personnel (deux radios) sur «Alouette» vers Alzo de l'autre côté de la montagne, en direction de Corte. Les radios se feront reconnaître par le mot «espoir»... Sur la carte, «Alouette» paraît assez près de la grotte. En réalité il faut plusieurs heures de marche pour atteindre le terrain... Impossible de décommander le parachutage, le radio n'a pas de contact avec Alger avant le lendemain. On envoie Ghérardi prévenir l'équipe de réception d' «Alouette». Le terrain est classé «arma». Elle n'attend donc pas de parachutistes. A l'heure prévue, d'immenses corolles de soie descendent vers la terre. - Oh! Madona! Oh! Madona! répète, extasié, un novice du parachutage. Et un coup de revolver claque. Fort heureusement, l'homme n'est pas atteint. Il continue de crier comme un beau diable: «Espoir! Espoir!». On se jette sur lui. On le garrotte. On l'interroge: - Je viens d'Alger. Je suis radio. On vous a annoncé mon arrivée. Du reste, cherchez sur le terrain, il y en a certainement un autre. C'est pourtant bien invraisemblable, un parachutage de radios sans avertissement préalable. On organise la battue et on trouve effectivement un deuxième bonhomme, enchevêtré dans son parachute. L'arrivée de Ghérardi, quelques heures plus tard en compagnie de Français Valentini, de Corte, dissipe le mystère. On délivre les deux radios. L'un d'eux, pris en charge successivement par Georges Albertini et J.-F. Gambini, sera confié à «Luc» sur la route nationale à la borne 5 km 100 après Corte. A l'aube, le radio et son guide se terrent dans le maquis, près de la borne indiquée. Après des heures de guet, le guide reconnaît la tête de «Luc» à la portière d'une voiture qui ralentit et stoppe. Deux secondes pour y engouffrer le radio et sa précieuse valise, et la voiture repart en ouragan. Effarement du radio quand il dévisage le conducteur: un colonel italien!... Notre parachutiste reste digne... et muet. Mais le silence dans cette auto qui brûle la route est trop pesant, Tout à coup, il éclate : Et «Luc» de répondre de sa voix la plus neutre : Le voyage se déroule sans encombre, les sentinelles italiennes présentant régulièrement les armes à chaque village traversé par la voiture du colonel. On approche d'Ajaccio. A deux kilomètres du pont de Pisciatello, brusque coup de frein. On prie le radio de descendre. Quatre hommes, mitraillette au poing, surgissent du maquis, l'encadrent et l'y entraînent. Une heure plus tard, notre homme, installé dans un taillis, prend contact par radio avec Alger tout en grommelant des «Ça, alors!» qui n'en finissent plus... Au même moment la voiture de Cagnoni, à la sortie d'un tournant, débouche sans s'y attendre sur la place de Villanova, déserte en un clin d'œil. «Luc» descend et le véhicule, fanion italien claquant au vent, fait demi-tour et repart. Villanova est à un kilomètre à vol d'oiseau du point d'embarquement. Mais la région est difficile et infestée d'ennemis Heureusement, j'avais donné à Luc le nom du responsable local du Front National: le maire, Perfettini. Un gamin en indique la maison. N'était ce grand rouquin somnolant sur le perron, on la dirait abandonnée... Mais sous la casquette qui masque le visage du «dormeur», un œil vif n'a rien perdu de la scène. «Luc» secoue l'homme qui s'ébroue, marmonne et s'en va d'un pas nonchalant. L'affaire se présente plutôt mal... Le rouquin revient peu après, le visage toujours aussi inexpressif : Dans une étable voisine, «Luc» est mis en présence d'un grand diable en pantalon de velours, le feutre noir sur les yeux. On s'observe. Allons-y, lâchons «le paquet» : Oh, vertu merveilleuse du sésame! Perfettini tombe dans les bras de Giovoni, le rouquin devient loquace, le «prisuttu» 1 est en un clin d'œil sur la table avec le «Campo d'Unico» qui vous fait couler du feu dans les veines. Le crépuscule se peuple de créatures silencieuses, à la démarche souple: les guides. Tout est paré. La batterie italienne sous la tour génoise du Capo di Feno, si près du point de débarquement? Excellent! Ils ne se douteront pas que nos «dockers» travaillent sous leur nez. En passant, on «chatouillera» leur fil téléphonique... Oh, juste le temps nécessaire pour les couper de leurs amis au bon moment. En route! «Luc» embarque cette nuit. Cheminement éreintant par un maquis agressif, longue séance d'alpinisme pour descendre la falaise de granit. «Luc» est en piteux état, les vêtements déchirés, les pieds en sang, le visage et les mains labourés d'égratignures mais radieux de retrouver Maillot qui, de son creux de rocher, torche en main, émet en morse tous les quarts d'heure la lettre «P» en direction du large. Peu avant minuit, un cri étouffé: «Le voilà!» Dans le noir un guetteur a cru distinguer une longue silhouette glissant rapidement sur les flots. Pas de doute, cette colonne au milieu, c'est le kiosque du sous-marin. Maillot multiplie les signaux... Un léger clapotis d'aviron... Un canot pneumatique s'est détaché du bord. Un petit commando de reconnaissance débarque ainsi qu'un radio 2. On prend contact. Le commando est supérieurement équipé. Il est relié au Casabianca par phonie, nouveauté depuis les dernières opérations. Du sous-marin on appelle Les feux de la batterie italienne clignotent avec une superbe indifférence. Mais, catastrophe! De l'autre côté, à droite, un puissant projecteur s'allume, fouille lentement la mer, s'immobilise sur le Casabianca, puis éclaire à giorno l'embarquement de «Luc». Les cœurs battent à se rompre. On fait le gros dos... Rien. Le sous-marin, tout près de la falaise, se confond avec les rochers. Du projecteur, on n'a pas vu les hommes. Le 6 septembre 3, à une heure du matin,«Luc» est à bord. Le débarquement des fusils antichars (5 tonnes) commence sur un canot pneumatique. A 4 heures, tout est terminé. Maillot organise le transport des armes vers Ajaccio. Giovoni vogue vers Alger où il arrive le 8 septembre à 8 heures du matin. Les services secrets de l'Armée y attendent «Monsieur Luc» avec impatience. Ils ont appris par radio qu'il apporte des documents de la plus haute importance. «Kidnappé» à l'arrivée et conduit sans délai à l'état-major, Giovoni, avec une humilité parfaitement feinte, exhibe les «papiers». Il s'agit d'un document de 181 pages donnant le détail de toutes les forces ennemies en Corse. |